: Le président du Faso, Blaise Compaoré, a rencontré successivement, le 4 avril 2011 au palais de Kosyam, les représentants des fondateurs des établissements scolaires, des parents d’élèves, des syndicats de l’éducation nationale et de l’alphabétisation, de l’enseignement secondaire et supérieur et les représentants des structures syndicales et associatives des étudiants et élèves. Au cours des deux rencontres, les représentants des différentes structures ont soumis au chef de l’Etat leurs préoccupations que ce dernier a promis d’examiner dans les tout prochains jours.
Le président du Faso, Blaise Compaoré, poursuit ses concertations en vue de recenser les préoccupations des différentes couches sociales et y apporter des solutions afin d’instaurer un climat de paix et de sérénité dans le pays. En effet, après avoir reçu le corps judiciaire et les militaires tous rangs confondus la semaine dernière, il a décidé de rencontrer le 4 avril 2011 les représentants des syndicats de l’éducation nationale et de l’alphabétisation, ceux de l’enseignement secondaire et supérieur, les représentants des parents d’élèves, les fondateurs des établissements scolaires et les représentants des structures syndicales et associatives des élèves et étudiants. Au cours des échanges, chacun des représentants a soumis au président du Faso les préoccupations de sa structure.
Un dialogue direct et franc
"Nous avons eu un dialogue direct et franc avec le président et nous nous sommes rendu compte qu’il avait envie d’entendre les hommes de terrain pour qu’on lui dise franchement certaines choses", a indiqué le porte-parole des syndicats de l’éducation nationale et de l’alphabétisation, Blégné Sema, à l’issue de la rencontre. Il s’est dit touché par le sens d’écoute du chef de l’Etat et surtout son humilité à reconnaître qu’il n’est pas toujours vérifié que l’information lui parvienne dans toute sa candeur. "A travers notre intervention, je pense que le président du Faso a pu toucher du doigt les problèmes que traversent le monde enseignant et le milieu scolaire", a-t-il soutenu. Selon M. Sema, les syndicats ont déploré les violations répétées des espaces scolaires, les violations des franchises universitaires durant la décennie.
Aussi, ils souhaitent que plus jamais ce type de comportement ne puisse être observé dans le milieu scolaire. Il a affirmé que les syndicats ont traduit au président du Faso le ras-le-bol des populations, le sentiment de frustration que les élèves, les encadreurs et l’ensemble du peuple ressentent lorsqu’à chaque fois qu’ il y a des exactions, la réaction attendue des autorités ne répond toujours pas à l’attente des citoyens. "Nous avons fustigé l’impunité sans ambages. Nous avons dit les mille vérités au président du Faso qui, sincèrement, est resté à l’écoute et n’a coupé personne dans son élan de rendre compte des impressions de la base", a-t-il confié. Il a laissé entendre que le président du Faso a pris l’engagement d’analyser tout ce qui a été dit et leur a donné rendez-vous pour ce mois d’avril pour répondre aux préoccupations qui lui ont été soumises.
Pour M. Sema, les syndicats de l’éducation nationale sont engagés à sauver l’année scolaire car ce n’est un plaisir pour personne de voir les élèves subir une année blanche. Il a confié qu’ils ont passé au peigne fin toutes les difficultés que vit le milieu enseignant et par delà, l’ensemble des travailleurs. "Nous avons insisté sur la vie chère. Lorsque vous prenez une famille nucléaire au Burkina Faso, le minimum c’est cinq personnes. Combien coûtent un litre d’huile et un sac de riz ? Nous avons rappelé au président du Faso que nous aurions souhaité que notre descente musclée dans les rues en 2008 soit un vieux et mauvais souvenir. Mais malheureusement, ce n’est pas le cas. Il y a une telle flambée des prix que le citoyen ne peut plus tenir. Le panier de la ménagère n’a connu aucune amélioration. Le peuple a faim", a-t-il martelé. Selon M. Blégné, le président du Faso a montré un sens extrême d’écoute et d’engagement à porter un regard sur les difficultés que connaît le monde des travailleurs.
Le président de l’Association nationale des étudiants burkinabè (ANEB) section de Ouagadougou, Mahamadou Fayama, a, pour sa part, soutenu que cette rencontre avec le président du Faso est une première. "Nous avons profité de l’occasion pour poser les problèmes que les étudiants vivent au quotidien. Ces problèmes sont d’abord académiques et ensuite relatifs à la liberté.
Vérité et justice pour Justin Zongo
C’est ainsi que nous avons demandé vérité et justice pour Justin Zongo", a-t-il souligné. Mais pour lui, cette justice doit s’étendre à tous ceux qui ont été tués à la suite des manifestations, car ces morts ont tout naturellement allongé la liste des dossiers de crime de sang dans notre pays. Il a révélé que rendez-vous leur a été donné pour une prochaine rencontre de synthèse et ils espèrent que leurs préoccupations seront prises en compte afin d’améliorer les conditions de vie et d’études des étudiants et des élèves. Selon l’étudiant Fayama, la question de la Police spéciale des universités sur les campus a été abordée et l’ANEB a demandé que cette police s’en aille. Il a confirmé la reprise des cours à l’université de Ouagadougou en soutenant que ce ne sont pas les étudiants qui ont refusé d’aller à l’école mais ce sont les autorités qui ont décidé de fermer les établissements. Donc, il était de leur devoir, a-t-il estimé, de les rouvrir. Pour finir, le président de l’ANEB a invité ses camarades à participer massivement à la marche du 8 avril prochain contre la vie chère.
Selon le porte-parole des fondateurs des établissements scolaires, Zakalia A. K. Sampebgo, le président du Faso les a conviés afin qu’ils puissent voir dans quelle mesure ils peuvent participer à la résolution de la crise. Ainsi, les fondateurs des établissements scolaires, a-t-il relevé, feront en sorte que l’éducation civique soit revue, car l’incivisme des élèves est dû au fait que cette discipline n’est plus beaucoup enseignée dans les établissements. Le porte-parole des parents d’élèves, Nougtara P. Paul, a, quant à lui, soutenu que leur souhait est de voir l’année scolaire se terminer dans le calme. Pour ce faire, il sied d’examiner avec diligence les revendications des étudiants, des élèves et des enseignants, a-t-il indiqué avant d’ajouter que le cri du coeur des parents d’élèves qui a été transmis au chef de l’Etat est qu’aucun élève ou étudiant ne tombe encore sous des balles assassines des forces de l’ordre. Il a demandé à ce qu’il y ait la sérénité afin que l’année scolaire puisse s’achever. Notons afin que les ministres de l’Education nationale et de l’alphabétisation, Marie Odile Bonkoungou, de l’Enseignement secondaire et supérieur, Joseph Paré, et de la Justice, garde des Sceaux, Jérôme Traoré, ont assisté à la rencontre.
Quelques responsables du monde éducatif livrent leurs impressions après la rencontre.
Mohamed Ali Dendé, secrétaire général du Front d’initiative pour un climat universitaire apaisé (FICUA)
Nous avons été reçus par le président du Faso sur nos difficultés au campus et dans les écoles de toutes les régions du pays. Le président a été satisfait de la rencontre car nous avons laissé parler notre coeur. Nous avons détaillé ce que nous vivons au quotidien au campus en parlant de la revalorisation du label des étudiants à travers l’amélioration des allocations (FONER et bourse), la réadaptation du calendrier universitaire. Parlant du FONER, il faut retenir que la dernière tranche que les étudiants ont reçue date de juillet 2010 et ce jusqu’à nos jours. Ces questions ont été évoquées avec le président qui a tout de suite perçu leur pertinence et leur sensibilité. Ce qui est également revenu, c’est justice et vérité pour notre camarade Justin Zongo et le président dit avoir bien compris notre requête. Cependant, vu que nous sommes dans un Etat de droit, il nous a parlé des contraintes judiciaires. Mais ce qui est encore bien, c’est que nous avons demandé l’institutionnalisation d’une telle rencontre et il a approuvé. C’est ainsi qu’une autre rencontre est prévue dans les tout prochains jours pour apporter des réponses concrètes à nos préoccupations.
Alfred Dabou, représentant de l’AESO : "Justice pour Justin Zongo"
A cette rencontre avec le président du Faso, nous lui avons parlé de la mort de Justin Zongo et de tous les autres camarades tués. Nous avons profité demander que justice soit rendue dans toutes ces affaires. Pour la première fois que le président nous reçoit, nous lui avons parlé des problèmes que nous vivons au sein des établissements secondaires et à l’université. Il a vraiment été à notre écoute et a promis de nous rencontrer prochainement.
Adama Congo, secrétaire général de l’Association des élèves du secondaire de Ouagadougou (AESO)
"La reprise des cours dépendra de la célérité dans le traitement de l’affaire Justin Zongo" Dans nos échanges avec le président du Faso, nous avons constaté qu’il était étonné de ne pas être au courant de certaines situations que nous vivons. A cela, nous pouvons dire que le problème vient de la base. Pour ce qui est de la reprise des cours tout dépendra de la volonté des autorités à accélérer le traitement du dossier de notre camarade Justin Zongo. Car si nous perdons patience, nous ne savons pas ce qui adviendra. Nous en appelons à la sagesse des autorités. Nous appelons egalement à la reprise sereine des cours.
Moumouni Derra, président de l’UGEB : "Nous souffrons d’insécurité sociale"
Nous avons échangé avec le président du Faso sur la situation nationale. De ces échanges, on ne pouvait s’attendre à mieux. Des engagements ont été pris par le chef de l’Etat dont nous attendons la réalisation. Nous avons réitéré notre position sur l’affaire Justin Zongo afin que vérité et justice soient faites. Les conditions de vie des élèves et étudiants ont été soulevées et de l’avis du président, des mesures seront prises dans ce sens. Cependant, je recommande la vigilance aux élèves et étudiants et les interpelle pour la grande marche-meeting du 8 avril 2011 contre la vie chère, la fraude, l’impunité, l’injustice et pour les libertés démocratiques. Nos problèmes sont d’ordre social, académique et pédagogique. Si aujourd’hui les élèves et étudiants sont dans l’insécurité, c’est en fait une insécurité sociale et non une insécurité physique comme on veut le faire croire en mettant en place une police spéciale dans les différentes universités, ce qui ne se justifie pas.
Saïdou Ouédraogo, secrétaire exécutif du Cadre de concertation des ONG et associations actives en éducation de base (CCEB) : "La situation actuelle résulte d’un déficit de communication"
Pour notre part, nous avons dit que la situation actuelle résulte d’un déficit de communication. On a le sentiment qu’on ne communique qu’à posteriori. A cet effet, nous avons souhaité qu’il y ait anticipation pour évoquer les problèmes avant qu’ils se posent. Aussi, nous avons demandé plus de rigueur afin que les responsabilités soient situées à chaque fois qu’il y a un problème. Nous voulons donner une collégialité à notre démarche pour que certains ne soient pas mis en avant et d’autres en retrait. Car, s’il y a des acquis, tout le monde va en profiter. On a eu une écoute attentive et promesse a été faite de se rencontrer à nouveau pour mettre en oeuvre les différentes propositions qui seront faites.
Cheick Souleymane Adam Konfé, président du Conseil supérieur des écoles franco-arabe (CSEF)
"Eviter à tout prix d’une année blanche" Nous avons abordé avec le président toutes les préoccupations des différentes écoles de notre pays. Nous avons souhaité que ce qui arrive au monde éducatif actuellement trouve une solution pour une reprise sereine des cours. Car nous devons à tout prix éviter une année blanche pour un meilleur devenir de nos enfants. Le président nous a bien écoutés et a promis de nous rencontrer pour des solutions concrètes.
Dabadi ZOUMBARA
Le Pays
Article publié le mardi 5 avril 2011
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