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lundi 21 septembre 2009
par Venance Konan, écrivain journaliste. / Email : venancekonan@yahoo.fr
du même auteur
L’anti-fétichisme des dates
Le prix de la sécurité
MSF(2)
Le soleil s’est couché sur Niamey
Quel Etat ?
J’étais à Cotonou ce même 14 septembre et justement, la rentrée scolaire était prévue pour se dérouler au Bénin ce jour-là. Et elle n’a pas eu lieu. Les enseignants avaient présenté quelques doléances que vous pouvez deviner au gouvernement, et ils attendaient la réponse avant de reprendre la craie. C’est un ministre burkinabé que j’ai déjà cité dans cette chronique qui avait dit que dans le secteur privé, lorsque l’on veut augmenter ses revenus, on travaille plus, alors que dans la Fonction publique, lorsque l’on veut augmenter ses revenus, on se met en grève. C’est ce que les enseignants Béninois étaient en train de mettre en pratique. Lorsqu’il est devenu bremier ministre, notre brillant Guillaume Soro avait bien dit qu’il n’avait pas le fétichisme des dates. Qu’est-ce qu’il avait raison ! Il n’est pas le seul à n’avoir pas le fétichisme des dates. C’est toute l’Afrique qui ne l’a pas. Depuis quand avons-nous respecté une date, un rendez-vous ? En Guinée, le très éloquent Dadis Camara avait dit qu’il organiserait les élections avant la fin de cette année. Ce sera au mieux au début de l’année prochaine, si Dieu le veut. Comme Dadis n’a pas non plus le fétichisme de la parole donnée, il veut dans la foulée être candidat à la présidence, contrairement à ce qu’il avait dit à son arrivée au pouvoir. Avez-vous déjà vu le « Dadis show » ? Tapez « Dadis show » sur Google ou sur n’importe quel moteur de recherche et vous le verrez dans ses shows. Et vous comprendrez que la Guinée n’est décidément pas sortie de l’auberge. Pour revenir à notre fétichisme, ou plutôt notre anti-fétichisme des dates, notre très compétent Premier ministre avait donc dit qu’il n’avait pas le fétichisme des dates. Ce qui voulait dire que l’élection présidentielle sera organisée à La Saint glin-glin. Et c’est bien ce qui est en train de se passer. Selon le très bel accord de Ouagadougou dont on ne cessera jamais de souligner combien il est beau (notre président bien-aimé avait même voulu qu’il soit affiché au fronton de l’ONU), cette élection devrait intervenir dix mois après sa mise en application. Nous sommes à plus de 30 mois, et rien ne nous dit si cette fameuse élection aura lieu. C’est tout cela qui fait la beauté de cet accord. Il faut cependant être un artiste ou un sorcier pour bien en apprécier la beauté. Mais le Premier ministre l’a bien dit : pas de fétichisme des dates. Nous sommes dans un pays où tout ce qui ressemble au fétichisme est vigoureusement combattu depuis l’arrivée des premiers prédicateurs musulmans et prêtres chrétiens. Pour bien nous faire comprendre qu’il ne faut pas être fétichiste, le beau facilitateur a pris son avion pour nous le dire à sa façon. Ceux qui savent lire entre les lignes ou qui savent décrypter la langue de bois ont bien compris ce que notre nouveau frère et facilitateur est venu nous dire : « pour votre élection, ne vous précipitez pas », a-t-il dit. Ce qui pourrait se traduire aussi par : pour votre élection, vous pouvez toujours courir. Effectivement, il n’y a aucune raison qu’on se précipite. La traite du cacao commencera bientôt, en octobre, pour s’achever vers février ou mars. Et comme on le sait, le pays de notre frère et ami est devenu par la magie de notre crise, un grand pays producteur de notre précieuse fève. Ou, plus exactement, une bonne partie de notre cacao est exporté à travers le pays des hommes intègres. Et ce sont eux qui perçoivent toutes les taxes payées par les exportateurs. Or, on le sait, le Burkina Faso a été durement frappé ces temps-ci par des meurtrières inondations. Il est vrai que nous avons donné 500 millions de nos francs, c’est la moindre des choses que l’on puisse donner à un facilitateur, mais ça ne peut guérir tous les maux de nos frères dans la détresse, et ce serait donc trop bête de laisser passer cette traite de cacao qui rapporte tant d’argent, en organisant précipitamment une élection présidentielle. Une élection que le nouvel ami et frère pourrait perdre par exemple. Il n’est pas évident que le nouveau président respecte à la lettre le beau deal signé à Ouagadougou un jour du mois de mars de l’an de grâce 2007. Que disent nos brillants opposants devant cet inéluctable report de cette élection qui est devenue comme le monstre de Loch Ness ? Bédié et Ouattara ont dit que pour eux, la seule date qui compte est celle du 29 novembre. Que feront-ils si ce n’est pas le 29 novembre ? Ce n’est pas la première fois qu’ils disent ça, et rien ne s’est passé. Wodié demande aux Ivoiriens de s’opposer à un nouveau report. Oui mais comment, cher professeur ? Que devrons-nous faire le jour où le chevelu Mambé nous dira, après un cocktail offert par le PNUD, que l’élection sera reportée, de quelques jours ou de quelques semaines ? On fait quoi, professeur, une fois qu’on aura fini de grogner dans nos salons et maquis ? On descend dans la rue ? Laquelle ? Ou bien on dit « si c’est comme ça, qu’ils prennent leur élection, nous on n’en veut plus ! » ? Je crois que si nos opposants ne nous disent pas cette fois-ci ce qu’il faudra faire en cas de report de l’élection, ce sera d’eux que nous devrons dire que nous ne voulons plus. Post Scriptum : le responsable du PNUD peut-il me dire à quelle porte de son auguste institution je dois frapper pour faire financer le cocktail que je veux offrir à l’occasion du bac de mon fils ?
Article publié le lundi 21 septembre 2009
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