« Moi, un noir », c’était lui. C’est en effet à Oumarou Ganda que Jean Rouch avait demandé d’interpréter un rôle d’ancien d’Indochine dans son célèbre film qui porte ce titre. Et ce rôle, c’était précisément le sien puisque Oumarou Ganda a fait partie de 1951 à 1955 du corps expéditionnaire français en Asie. Il n’avait que 16ans. A son retour, il fut un an enquêteur-statisticien à Abidjan (il s’agissait d’étudier les migrations des nigériens en Côte d’Ivoire). En 1957, il rencontre Jean Rouch, tourne donc « Moi un Noir » puis devient comme Inoussa Ousseini, assistant-réalisateur à la section cinéma du Centre culturel franco-nigérien de Niamey. En 1968, il décide de réaliser lui-même un film sur son aventure coloniale : « Cabascabo ». Sans fioritures inutiles, avec une grande simplicité, Oumarou Ganda déroulait un récit émouvant par son authenticité et sa vérité. En 1970 il tourne (en couleur) son second moyen métrage « le Wazzou Polygame ». C’est la tartufferie religieuse qu’il épingle ici. Bien que plus fragmenté car les ellipses sont nombreuses et importantes, le récit est simple et linéaire, mais Oumarou Ganda évite de céder à un moralisme pesant pour dénoncer l’hypocrisie de son personnage et réussit un tableau de mœurs particulièrement vivant. C’est le même style que l’on retrouve dans son troisième film, « Saïtane » réalisé en 1973. Même style et sujet proche puisqu’il s’attaque cette fois, avec plus de hargne encore, à un marabout qu’il tourne ostensiblement en dérision. Oumarou Ganda a encore réalisé trois documentaires avant de s’éteindre en 1981 à Niamey. L’Afrique du cinéma toute entière lui a rendu un hommage exceptionnel en décidant de décerner au Fespaco un prix portant son nom. Le Niger a quand à lui donné son nom à sa plus grande Maison des Jeunes et de la Culture.
(extrait de « cinéastes d’Afrique Noire » de Guy Hennebelle et Catherine Ruelle)
Article publié le vendredi 5 septembre 2008
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