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RSF appelle à faire pression sur la Chine pour qu’elle libère l’éditeur suédois Gui Minhai, condamné à 10 ans de prison | RSF



L'éditeur suédois Gui Minhai, 55 ans, détenu arbitrairement en Chine en dépit de graves problèmes de santé, a été condamné lundi 24 février à une peine de dix ans d’emprisonnement pour avoir « illégalement diffusé à l’étranger des informations classées. » Gui Minhai, actionnaire principal d’une maison d’édition hongkongaise connue pour ses publications à scandale sur la vie privée des dirigeants chinois, est le dernier détenu d’un groupe de cinq éditeurs qui avaient disparu en 2015 avant de réapparaître lors des séances de confessions forcées à la télévision publique chinoise. Dans son jugement, la Cour populaire intermédiaire de Ningbo (Zhejiang) indique que Gui Minhai a « plaidé coupable » et « ne fera pas appel » et assure que l’éditeur, naturalisé suédois en 1996, aurait effectué de son plein gré les démarches pour rétablir sa nationalité chinoise en 2018. 



RSF dénonce cette scandaleuse parodie de justice et appelle les démocraties du monde entier faire pression sur la Chine pour qu’elle libère Gui Minhai et tous les autres journalistes et blogueurs emprisonnés.



« Le cas de Gui Minhai crée un dangereux précédent dans lequel le régime de Pékin s’arroge le droit de kidnapper un citoyen européen dans un pays tiers, de le détenir arbitrairement plus de 4 ans et de le condamner à une peine de prison qui équivaut à une sentence de mort compte tenu de son état de santé », s’indigne Erik Halkjaer, président de Reporters sans frontières (RSF) Suède. 



« Cet acharnement envers un citoyen étranger, au mépris de la constitution chinoise comme du droit international, montre que Pékin considère la passivité des démocraties comme un fait acquis, regrette Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de Reporters sans frontières. « S’il ne rencontre pas plus de résistance, le régime de Xi Jinping saura qu’il peut impunément enlever ses opposants n’importe où dans le monde, les détenir au secret aussi longtemps qu’il le souhaite, les exhiber à la télévision comme des bêtes de foire, prétendre qu’ils sont libres au mépris de l’évidence, et même les empêcher de se faire soigner. »



Kidnappé en Thaïlande



Gui Minhai, actionnaire principal de la librairie hongkongaise Causeway Bay et de la maison d'édition Mighty Current, spécialisée dans les révélations à scandale sur la vie privée des dirigeants chinois, avait disparu le 14 octobre 2015, vraisemblablement kidnappé par les services secrets chinois dans sa résidence de Pattaya (Thaïlande). Il était réapparu sur la chaîne publique CCTV le 17 janvier 2016, pour une confession prétendument “spontanée” filmée dans un centre de détention chinois.



Le régime de Pékin lui a reproché, en vrac, d’avoir effectué « des opérations commerciales illégales », d’avoir « divulgué des secrets d'État » et d’avoir « fréquenté illégalement des diplomates étrangers. » En 2017, les autorités chinoises l'ont aussi empêché de rencontrer un médecin choisi par son ambassade alors qu’il présentait les symptômes d’une maladie neurologique grave.



RSF a appelé à plusieurs reprises à la libération de Gui Minhai et a soumis son cas au groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire (UNWGAD). Le 15 novembre 2019, l’éditeur s’est vu décerner le Prix Tucholsky de l’association de défense de la liberté d’expression PEN Suède, remis par la ministre suédoise de la Culture et de la Démocratie en dépit de menaces publiques proférées par l’ambassadeur de Chine en Suède Gui Congyou. La semaine dernière, en Suède, un groupe de défenseurs de la liberté de la presse, dont RSF, a aussi publié une lettre ouverte appelant à la libération de l’éditeur.



La Chine, avec plus de 100 journalistes derrière les barreaux, se classe au 177ème rang sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial RSF de la liberté de la presse 2019. La Suède figure pour sa part au 3ème rang.


Article publié le mardi 25 février 2020