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Créée en 2017 par John Kamande Ngamiya, surnommé « Mr Organic », la ferme familiale Wakas allie activités agricoles et élevage dans une approche agroécologique exemplaire. Elle s’étend sur deux hectares au centre du Kenya, à environ une heure et demie de la capitale Nairobi. Wakas Organic Demonstration Farm (WaOD) est un modèle de diversification agricole respectueuse de l’environnement. Les cultures cohabitent harmonieusement avec l’élevage dans une approche intégrée, sans usage de produits chimiques de synthèse.
La ferme abrite une production animale variée comprenant porcs, chèvres, lapins et abeilles. La visite du rucher constitue un moment particulier, marqué par le respect du silence, car comme l’explique Mister Organic, les abeilles n’aiment pas être perturbées dans leur besogne.
La production végétale est tout aussi variée avec diverses cultures: maïs, patates, bananes, plantes médicinales et surtout des avocatiers qui dominent le paysage. Ces derniers représentent la culture phare de la ferme, avec 75 à 80 % de la production destinée à l’exportation vers l’Europe, le reste alimentant le marché local.
En ce mois de février 2025 marqué par une faible pluviométrie au Kénya, l’arrosage du verger se fait pied par pied tous les jours. L’année dernière, l’eau était transportée dans des bidons et répandue manuellement sous les avocatiers. Cette année, grâce à la générosité d’un bienfaiteur, la ferme Wakas dispose d’un puits avec un système de canalisation de l’eau sous les arbres.
Centre de savoir et d’échanges
Wakas Organic Demonstration Farm se veut en outre un véritable centre de démonstration pour les agriculteurs en quête de savoirs sur l’agroécologie. « Nous avons déjà accueilli des apprenants de 27 préfectures sur 45 que compte le Kenya. Nous avons aussi reçu des délégations de 8 pays africains », affirme fièrement Mister Organic. Ce site est devenu une référence pour ceux qui souhaitent adopter des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement et bénéfiques pour la santé.
Ce 12 février 2025, c’est avec une grande aise que le propriétaire des lieux accueille des visiteurs étrangers. La délégation de ce jour est la plus forte jamais accueillie sur les lieux. Une soixantaine d’acteurs de la société civile venus de 22 pays, dont 19 d’Afrique et 3 d’Europe, ont foulé le sol de la ferme Wakas. Cette visite se faisait en marge de l’atelier sur l’agroécologie et les systèmes alimentaires durables qu’organisait du 10 au 14 février 2025 à Nairobi l’organisation allemande Pain pour le monde.
A ces visiteurs, John Kamande Ngamiya déroule la genèse de sa plantation. Cette contrée jadis fertile où il est né il y a plus de 70 ans, a vu son sol se lessiver progressivement du fait du changement climatique et des pratiques culturales inappropriées. Il explique que le premier marigot où le village s’approvisionnait en eau se trouvait à 500 mètres en 1962. En 2025, les villageois doivent parcourir 5 kilomètres pour puiser de l’eau en saison sèche.
Pour cet enseignant parti à la retraite en 2015, soit deux ans avant de devenir exploitant agricole, l’agroécologie est la solution pour la protection de l’environnement. Elle procure des aliments sains aux consommateurs et péserve la santé des agriculteurs.
Au Kenya, dit-il, les sols fertiles se trouvent là où vivent les animaux et non pas là où vivent les hommes. Ce sont donc les humains qui détruisent le sol. Ils peuvent et doivent trouver le moyen de restaurer le sol épuisé par de mauvaises pratiques. L’agroécologie est le moyen utilisé par la ferme Wakas pour restaurer la terre de manière durable.
Un avenir prometteur pour l’agroécologie
A 70 ans passés, Mister Organic ne cache pas son optimisme quant à la pérennité de son action. « Les membres de ma famille, y compris plusieurs de mes enfants, travaillent dans notre ferme aux côtés des autres employés. Mon souhait est de voir d’autres familles créer des exploitations agroécologiques au Kenya », confie-t-il.
Pour lui, ce n’est pas un luxe de pratiquer l’agriculture biologique ou l’agroécologie, mais c’est une nécessité. « La santé n’a pas de prix. Je ne suis pas d’accord avec ceux qui disent que le bio coûte cher. », martèle-t-il.
La ferme Wakas, modeste exploitation de 2 hectares, est un exemple inspirant pour l’agriculture africaine. Elle illustre comment une approche agroécologique bien menée peut conjuguer rentabilité économique, préservation de l’environnement et transmission des savoirs, pour une agriculture durable et responsable.
Marie Pauline Voufo
Article publié le mardi 18 février 2025
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