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Congo-Brazzaville : 05 juin 1997- 05 juin 2021, violence et mémoire - DAC E-NEWS


Le clin d’oeil de Gilbert GOMA Gilbert GOMA Congo-Brazzaville : 05 juin 1997- 05 juin 2021, violence et mémoire  

La guerre du 05 juin 1997 est le symbole de l’épuisement de l’éthique et de la morale, de la sécheresse de la pensée et de l’errance de la Raison.

L’Histoire politique du Congo-Brazzaville est le récit d’une récurrence des violences dont la conquête ou la conservation du pouvoir d’état demeure l’enjeu principal. Les esprits ont du mal à s’émanciper de cette inconcevable culture de la violence, de cette idéologie mortifère qui se déploie sur plusieurs dimensions, tant symboliques que réelles, et dont les populations en pâtissent cruellement.

Cette banalisation du mal à laquelle les politiques, dépourvus d’un réel projet de modernisation de ce pays, ont habitué les Congolais, vide de son contenu éthique et moral toute possibilité de construire ensemble ou toute initiative transpartisane de progrès. Suspicion, méfiance, entre-soi, repli identitaire, frustration tels sont les maux qui caractérisent notre pays. Cette banalisation du mal constitue un réel obstacle à l’édification d’une nation et d’un état dignes de ce nom.

Les esprits endurcis par la haine, pétris de cynisme face à la douleur de leurs compatriotes et soufflant en permanence sur les braises de la division, font glisser le Congo-Brazzaville sur la pente du chaos depuis des décennies. Légendes, fables et haines antérieures constituent les supports idéologiques qui justifient et alimentent leur dévoiement. La pensée comme modalité d’élévation d’une société n’a pas le moindre espace en eux, et a été substituée par la violence comme aune de la gloire.

Mais, quoi qu’il en soit, nul ne peut empêcher la manifestation de l’expression plurielle ou faire fî de la richesse de la transversalité des intelligences, qui constituent les fondements de toute société.

Le Congo-Brazzaville connaît actuellement une crise multiforme qui est avant tout structurelle que conjoncturelle, et dont les racines sont logées en grande partie dans la violence politique qui sévit depuis des décennies. C’est pourquoi les solutions pour régénérer ce pays résulteront d’une analyse objective des vraies causes de la violence politique, auquel cas elles n’auront qu’un caractère cosmétique et illusoire. Les gouvernements peuvent se succéder autant que possible, même avec des programmes ronflants ou soutenus par des quelconques partenaires (FMI, etc.), mais tant que l’espace politique ne sera pas pacifié, tant qu’il n’y aura pas la libération de la parole avec des débats démocratiques, le malaise actuel persistera, avec une paupérisation toujours croissante de la population.

Afin de renouer les liens brisés par la logique de la violence, il faut l’éclosion d’une pensée de raccordement social, formalisée et portée par le génie collectif congolais. Il s’agit bien entendu d’une vraie réflexion, sans tabou et sans atermoiement, qui doit être matérialisée par des solutions audacieuses afin de sortir de la déprime générale actuelle.

La violence politique comme modalité des rapports sociaux est une source de blocage multiforme qui doit être bannie des esprits. Elle est antinomique à l’esprit créatif et au progrès. Sa nocivité n’est plus à démontrer, car chaque Congolais en porte les stigmates, d’une manière ou d’une autre. L’éloigner radicalement de notre univers mental est, pour chacun de nous, par-delà nos opinions, un acte important et une contribution significative pour la modernisation de notre pays, sauf à se méprendre en acceptant la servitude volontaire à travers le bourbier de l’ethno-militantisme, qui n’a pour horizon que la division des Congolais en termes du « Nous » et « Eux », de l’encrage géographique qui ne peut engendrer une conscience commune et un idéal commun.

Avec ses nombreux morts et son chapelet de souffrances qui hantent la conscience collective congolaise, la date du 05 juin 1997 est le symbole de l’épuisement de l’éthique et de la morale, de la sécheresse de la pensée et de l’errance de la Raison. S’incliner en toute conscience devant ce moment innommable, ce moment de la vacance du Kimuntu (éthique et morale), permet de sacraliser la figure de l’Autre comme prolongement de soi-même et de l’être-ensemble dans un pays débarrassé de toute suspicion, où chacun apporte sa contribution pour son édification ; dans un pays où nul n’est exclu à cause de ses origines ethniques, régionales ou de ses idées ; dans un pays où le pouvoir politique ne saurait être un enjeu de domination ethnique ou régionale ; dans un pays où le bien collectif est mis au service de l’intérêt général. Mais cette perspective suppose une alliance des grands esprits, des patriotes, qui ont une vision claire et féconde pour le pays. Ceux-là dont le meilleur d’eux-mêmes, par-delà la diversité de leurs opinions, ne trouve de finalité que dans l’intérêt général, dans la construction d’un idéal commun.

Les civilisations qui ont marqué ou qui marquent encore l’Histoire, ont toujours été portées par la vision, la volonté et l’abnégation des grands esprits au delà de leurs différences.

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Article publié le mardi 6 juin 2023
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