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L’insupportable manque d’accès à l’eau des personnes exilées vivant sur le littoral nord de la France - SOLIDARITÉS INTERNATIONAL Des milliers de personnes tentent de traverser la Manche chaque année pour rejoindre le Royaume-Uni, parfois au péril de leur vie. On compte entre 30 000 et 36 000 traversées en 2023¹, et depuis 2014, au moins 205 personnes sont mortes ou portées disparues lors de ces traversées². Avant de se lancer dans ces périlleuses traversées ces personnes exilées sont nombreuses à séjourner sur le littoral nord français, dans des conditions qui les mettent déjà en danger. Grâce au soutien de la Fondation Abbé Pierre, SOLIDARITÉS INTERNATIONAL travaille aux côtés d’associations locales dans ces campements et permet à ces personnes d’accéder au minimum vital. Nombre de personnes exilées présentes sur le littoral nord en 2023³ Calais Entre 600 et 2 000 personnes Dunkerque Entre 400 et 1 000 personnes avec des pics allant jusqu’à 2 000 personnes Ouistreham Entre 30 et 200 personnes France Contexte et action 68,4 millions d'habitants 28ème sur 191 pays pour l'Indice de Développement Humain 8 194 personnes bénéficiaires Les personnes exilées habitant les campements du Nord littoral vivent dans des conditions extrêmement instables. Ces lieux de vie sont soumis à la politique dite “zéro point de fixation”, c’est-à-dire qu’ils sont systématiquement et régulièrement expulsés afin d’éviter l’établissement de tout nouveau bidonville durable. Ainsi, en 2023, on comptabilisait au moins 704 expulsions de lieux de vie, soit une expulsion toutes les 48 heures à Calais, et toutes les trois semaines à Dunkerque. Litres d’eau disponibles par jour et par personne à Dunkerque en 2023 Dans ces territoires où les conditions de vie sont très précaires, l’accès à l’eau est insuffisant et les normes françaises en la matière ne sont pas appliquées. Ces privations font peser sur les personnes exilées des risques sanitaires importants. Sur place, les associations tentent de pallier le manque mais ne peuvent se substituer aux pouvoirs publics et pour répondre aux besoins essentiels des personnes exilées, du fait de leur petite taille, de leur fonctionnement reposant largement sur le bénévolat et de leurs capacités financières limitées. À Calais, Ouistreham et Dunkerque, les associations veillent à ce que les habitants des campements aient de quoi boire et se laver, mais l’eau à disposition reste largement insuffisante. Boire de l’eau potable À proximité des camps, les points d’eau sont rares, parfois vétustes et souvent loin des personnes qui les utilisent. En novembre 2023, 85% des personnes exilées devaient marcher en moyenne 7 km (soit 1 heure 20 aller-retour), pour se rendre sur un point de distribution d’eau de l’association La Vie Active. Je ne me sens pas en sécurité pour aller chercher de l’eau à la cuve sur le campement, de nombreuses personnes ont des armes, des pistolets et des couteaux partout. Nazar, jeune homme soudanais de 24 ans, vivant à Dunkerque depuis 2 mois Les contenants nécessaires pour transporter et stocker l’eau ne sont pas systématiquement disponibles, alors qu’ils sont essentiels dès lors que les personnes ne disposent pas d’un accès direct sur leur lieu de vie. Il faut alors recourir à des solutions alternatives pour transporter de l’eau, notamment l’usage de bouteilles vides usagées ou de jerrycans sales et non fermés, qui peuvent entraîner le développement de maladies hydriques et gastro-intestinales. Faute de mieux, les habitants consomment donc l’eau à leur disposition, au risque de mettre leur santé en danger. Utilisation d’eau de canaux ou rivières Paroles des associations « En novembre 2023, les habitants d’un site isolé ont montré aux bénévoles de CFC des jerrycans remplis d’une eau sale provenant d’un lac voisin. Ils l’utilisent pour boire. Le même jour, un bénévole de l’association a vu des personnes vivant sous les ponts du centre-ville de Calais boire l’eau de la rivière qui traverse la ville. » Calais Food Collective Se laver Paroles des associations « Nous observons régulièrement des enfants au visage et dents sales, ainsi qu’aux cheveux gras, mais nous rencontrons également de nombreux enfants qui expriment leur peur de se salir en jouant, car ils n’ont pas la possibilité de se laver les mains ni leurs vêtements. Ils acceptent de participer, dès lors que nous leur proposons de porter des tabliers. Ces derniers mois, à de nombreuses reprises, des enfants qui portaient des vêtements qui sentaient fortement la transpiration. » Project Play À Calais, contrainte par les juges, la Préfecture a mis en place un système de douches géré par l’association La Vie Active. Elles sont accessibles uniquement via des navettes mises à disposition par l’opérateur. On compte 4 points de ramassage à destination des hommes et un créneau est mis à disposition pour les femmes, ce qui est largement insuffisant. À Ouistreham, 3 blocs sanitaires mobiles ont été installés sur le lieu de vie comprenant chacun une cabine de douche, mais elles sont restées inutilisables en 2023, à cause de l’absence de lumière, d’eau chaude et d’évacuation. Il faut se lever tôt le matin et faire la queue longtemps pour pouvoir obtenir un ticket. Et même si vous avez le ticket, ça ne vous garantit pas que vous pourrez prendre une douche. il faut ensuite attendre son créneau sans s’éloigner de la zone, pendant parfois très longtemps. Abdi, 21 ans, originaire de Somalie, vivant à Calais Trouver des toilettes Il n’existe pas de toilettes, les gens vont dans la forêt faire leurs besoins, on est bien obligés. Nous les femmes, nous sommes confrontées à la période des règles, je les ai eues il y a quelques jours et c’était extrêmement pénible. j’avais très peur des conséquences du manque d’hygiène sur ma santé. Des associations nous ont fourni des protections et des sous-vêtements mais il faut avoir accès à un minimum d’hygiène et d’eau lorsqu’on a ses règles. Sahar, mère de deux enfants, originaire d’Iran, vivant à Mardyck depuis une semaine Si des toilettes publiques sont généralement disponibles dans les centres-villes, celles-ci ne sont pas systématiquement ouvertes en continu ni accessibles aux personnes exilées en raison de leur distance. À Calais comme à Ouistreham, certaines latrines ont été installées sur les lieux de vie, mais elles restent en nombre insuffisant. Le manque d’infrastructure est aggravé par l’absence de points d’eau permettant aux personnes exilées d’assurer un minimum d’hygiène, notamment pour se laver les mains après avoir fait leurs besoins. Solutions alternatives pour faire ses besoins Besoins réalisés en extérieur Nazar, 24 ans, originaire du Soudan, vivant à Dunkerque depuis deux mois : « La nuit on doit y aller en groupe pour se sentir en sécurité. Je n’ai pas l’habitude de faire cela, chez moi en temps normal j’ai accès à une douche et à des toilettes. » Utilisation de couches pour adulte Refugee Women’s Centre : « L’un des produits les plus demandés sont les couches d’incontinence pour adultes, que les femmes utilisent afin d’éviter de devoir faire leurs besoins à l’extérieur plusieurs fois par jours. Toutefois, cela augmente le risque d’infections vaginales et d’irritation sévère à cause de l’humidité prolongée. » Pratique prolongée du jeûne pour éviter d’avoir à utiliser les toilettes Helen, jeune femme seule de 21 ans, originaire d’Erythrée, vivant à Calais depuis une semaine : « Nous avons besoin de toilettes dans les jungles, pour ne pas devoir faire nos besoins dans la nature. Je ne veux pas importuner les gens qui habitent dans cette ville, je ne veux pas les déranger et abimer leur environnement. J’essaye de pas boire ni manger pour utiliser le moins possible les toilettes. » Laver son linge Garder ses vêtements propres dans les campements est tout aussi complexe, puisqu’aucun dispositif étatique de lavage du linge n’est mis en place, et les systèmes proposés par les associations sur le terrain demeurent malheureusement insuffisants. Paroles des associations « Les conditions de vie des personnes en extérieur engendrent un besoin d’autant plus grand de pouvoir laver ses vêtements. Sans moyens de s’abriter, les affaires des personnes deviennent rapidement inutilisables si elles ne peuvent être séchées. Par ailleurs, les expulsions (en moyenne toutes les 48 heures), entraînent une destruction et une confiscation régulière des affaires personnelles, laissant parfois les personnes avec seulement les vêtements qu’elles portent. » Collective Aid Des fois, je donne mes vêtements aux dames des associations, ou bien le camion vient avec des machines, deux fois par semaine. Mais parfois, je dois jeter mes vêtements quand ils sont trop sales, parfois ça me gratte la peau, il y a des mites qui font des trous dans mes vêtements. Ahmed, mineur isolé, 15 ans, originaire du Soudan, vivant à Dunkerque depuis 3 mois Un défi quotidien Pour la population de ces lieux de vie, le simple fait d’accéder à ces services pour boire et rester propre est un défi quotidien. À Calais par exemple, le trajet à pied jusqu’aux toilettes peut prendre 50 minutes. Une journée d’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement à Calais Face à des conditions indignes d’accès à l’eau, à l’hygiène et à l’assainissement sur le littoral nord de la France, les associations se mobilisent pour offrir des solutions concrètes. L’installation de sanitaires et de points d’eau, couplée à des distributions de kits d’hygiène, vise à répondre aux besoins urgents des populations exilées. Ces actions s’inscrivent dans une dynamique de sensibilisation et de plaidoyer qui accompagne l’évolution juridique nationale vers une meilleure reconnaissance de l’accès à l’eau et l’hygiène comme des droits fondamentaux. Cette situation d’extrême précarité dans laquelle sont plongées les personnes exilées vivant sur le Littoral Nord est contraire aux normes juridiques françaises et les plonge dans un grand danger. Les conséquences sanitaires sont délétères, y compris sur le plan de la santé mentale. Pour mieux connaitre la situation, découvrez notre “Observatoire de l’accès à l’eau, l’hygiène et l’assainissement sur le littoral Nord de la France en 2023. Lire l’observatoire Sources : ¹ Chiffres du Home Office et de la Préfecture de la Manche et de la Mer du Nord ² Chiffres tirés du projet « Migrants disparus » de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM). Données | Missing Migrants Project (iom.int) ³ En l’absence de recensements officiels et de communication par les autorités, ces chiffres sont des estimations effectuées par les associations locales Soutenez nos actions sur le terrain Je fais un don Article publié le mardi 28 janvier 2025 44 lectures |
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