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Julienne ZANGA (JulienneZanga.com)
Si l'on pouvait parler
de notre amie, elle sait donner un sens à l'écrit par une forte imprégnation
mystique et la beauté africaine.
"...Alors, à la mort de ses grands-parents, Alima doit traverser la forêt
pour rejoindre la Côte. Mais, un air de tristesse flotte au bord de l'océan.
Depuis qu'un villageois a rompu le pacte conclu avec les mamiwatas, le
peuple des eaux, aucune pirogue ne va plus à la pêche et la famine
s'installe. Les chants d'Alima sauront-ils attendrir le coeur des souverains
de la mer ?..." (ouvrage : "Alima et le prince de l'océan")
PlaneteAfrique : La religion a toujours été au coeur de votre cursus.
Qu'en est-il dans votre démarche de création littéraire ?
Z. Julienne : " Effectivement, ma première scolarité (on cursus
maternelle et primaire) s'est déroulée dans une institution catholique, de
même que mes études universitaires. Mais, je ne me considère pas aujourd'hui
comme fille d'une quelconque religion officielle. Pour moi, point n'est
besoin de suivre tout un protocole pour affirmer sa foi. Le respect mutuel,
c'est ça mon crédo. Ce constat fait, je dirai que l'acte de création étant
intimement lié à notre vécu, il puise évidemment dans tous les éléments
(éducation, famille, milieu social...) qui participent à notre personnalité.
Donc, que je le veuille ou pas, mes nombreuses années dans l'enseignement
catholique ont influé sur ma perception des choses. Ainsi, je suis
profondément attaché aux valeurs de probité, d'acceptation de l'autre et
cela se ressent dans mes écrits.
Pour résumer, en ce qui concerne l'acte de création en lui-même, je me fis
surtout à mes sensations, à mon imagination.
PlaneteAfrique :
Pouvez-vous de nous parler de votre premier ouvrage "Alima et le prince de
l'océan"
Z. Julienne : Ce livre n'est pas le premier que j'ai écrit, mais le
premier à être publié par un éditeur et ce, en novembre 2001. C'est un roman
pour la jeunesse qui traite du thème des préjugés. Il a ceci de particulier
qu'il aborde le thème des sirènes sous un angle africain. Sur la côte
africaine, les sirènes sont généralement désignés par le terme de "Mamiwatas",
contraction de "Mothers of water", "Mères de l'eau". Au Brésil, c'est "Yemandja".
Bref, partant de la mythologie noire, je raconte la rencontre entre deux
mondes, celui des humains et du peuple de l'eau. Au centre de cette histoire
qui nous mène de la savane africaine vers la côte forestière, se trouve
Alima, jeune orpheline à la voix d'or en qui réside le sort de tout un
peuple.
PlaneteAfrique : Vous avez quitté
Yaoundé pour Paris, que regrettez vous le plus de l'Afrique ?
Z. Julienne : Difficile de parler de regrets, car j'ai gardé un
contact très fort avec mon continent. Je m'informe régulièrement de son
actualité via les sites panafricains comme vous. Depuis mon arrivée ici, j'y
suis retournée quatre fois dont 3 fois avec ma fille de 6 ans née en France.
Je tiens à ce qu'elle connaisse ses racines.
Si regret il y a, c'est la chaleur humaine en cas de coup dur. Ici, c'est
quasiment du chacun pour soi côté contacts humains.
PlaneteAfrique : Votre
démarche littéraire vous a conduit à Paris donc, pensez vous que cela
influence vos inspirations ?
Z. Julienne : Les écrits ne naissent pas du néant. Ils s'appuient sur
notre vécu, nos expériences, nos rencontres... Je vis aujourd'hui dans la
région parisienne, cette mosaïque culturelle. Le monde s'y cotoie dans ce
qu'il a de plus divers et pour une écrivaine, c'est une formidable source
d'inspiration. D'ailleurs, dans EBONI (Celui qui courait après un corps),
mon second ouvrage à paraître courant 1er trimestre 2003, plusieurs
nouvelles de ce recueil se déroulent dans les micro-sociétés africaines de
Paris. Ainsi, dans "Les amants de saint Denis", le personnage principal est
un jeune marocain. Là-dedans, il y a des afro-antillais, des noirs de
France, des noirs d'Afrique... En fait, j'aime par dessus tout mélanger des
lieux, des peuples. Même si l'Afrique est omniprésente dans mes écrits, il y
a toujours une extrapolation vers d'autres univers.
PlaneteAfrique : Un petit mot sur
les superbes illustrations de Isabelle Malmezat que nous pouvons retrouver
sur votre site.
Z. Julienne : Isabelle est l'illustratrice d'ALima et le prince de
l'océan. C'est vrai qu'elle est pour beaucoup dans le succès de ce livre. A
ce sujet, une anecdote. Je n'ai pas eu mon mot à dire à l'éditeur concernant
les dessins du livre, et je redoutais un peu de voir le résultat final. ma
hantise, illustrateur saura-il traduire en dessins ma vision d'Alima et des
mamiwatas? Quand on m'a envoyé la maquette de couverture, j'ai été apaisée.
Cette femme que je n'avais jamais rencontré, avait fait des dessins
traduisant au mieux ce que je voulais. Quand j'ai eu l'occasion de la voir,
lors d'un salon du livre, je lui ai dit toute ma gratitude.
PlaneteAfrique : Que pouvez-vous
nous dire d'Internet que vous nommez "village planétaire" ?
Z. Julienne : Pour moi, sans omettre l'aspect ludique, Internet
est un formidable outil de communication et de rapprochement des peuples.
Plus de frontières, de restrictions. Le monde s'offre à l'internaute. Le
monde ressemble dès lors à un grand village. L'africaine que je suis est
toujours frustrée de voir la façon dont l'actualité du continent est traitée
par les médias. Guerres, famines... Et ceux qui réussissent ? On en parle
rarement. Grâce à Internet, je peux découvrir ce qui se fait dans les
communautés noires en occident, ou en Afrique. Bref, l'information que j'ai
est plus vaste.
PlaneteAfrique : Quels espoirs
mettez-vous dans les nouvelles technologies, avez-vous des craintes
particulières ?
Z. Julienne : L'Afrique a beaucoup à gagner en développant les
nouvelles technologies comme Internet. Associations, entreprises... Internet
devient pour tous un moyen moins fermé d'établir des partenariats, faire
parler de soi, toucher des univers différents, éduquer... Le défi, c'est de
rendre cet outil accessible au plus grand nombre. Or, malgré les efforts
consentis, beaucoup reste à faire. Le prix du matériel ou des connexions est
encore prohibitif pour l'africain moyen. En plus, les infrastructures ne
suivent pas toujours. Ma plus grande crainte, que certains récupèrent cet
outil à leur unique profit, et en écartent les pays du Sud. Une autre, en
tant que femme et mère de famille, est la dérive sexuelle avec les images
pédophiles ou avilissantes. C'est pourquoi l'accès d'Internet aux enfants
doit être contrôlé. Il faut un minimum de surveillance.
PlaneteAfrique :
Croyez-vous en l'explosion des nouvelles technologies en Afrique et au
Cameroun en particulier ?
Z. Julienne : Si je prends l'exemple du Cameroun, oui. En 1994,
j'étais obligée d'user du téléphone, prohibitif, pour communiquer avec
l'Europe. Aujourd'hui, ma famille et moi communiquons par email
essentiellement. On s'envoie des documents, des photos, chose impensable il
y a quelques années seulement. A Yaoundé en particulier, les cybercafés
prolifèrent tandis que le mobile se banalise de plus en plus.
Il suffit de taper AFRIQUE sur le web pour voir tous les sites qui voient le
jour.
Mais, comme je le disais, pour qu'il y ait vraiment une explosion de masse,
il faut repenser l'accès aux nouvelles technologies. En ce qui concerne
Internet, il est un peu utopique de penser que chaque famille africaine
puisse disposer d'un ordinateur et du téléphone. Mais, on peut agir au
niveau des cybercafés, en mettant en place des politiques gouvernementales
pour favoriser leur essor, avec en retour une baisse significative des prix
proposés dans ces lieux.
PlaneteAfrique - 2002 |
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