1 Histoire précoloniale
On sait peu de choses sur l’histoire de ces régions, même si les travaux des archéologues permettent d’affirmer qu’elles ont fait l’objet d’un peuplement très ancien. Bayle des Hermens, 1975, a trouvé dans le sud-est du pays des galets de l’époque préacheuléenne. Dans le nord-est, il existe des peintures rupestres. Quant aux recherches de Pierre Vidal, 1969, elles ont montré l’existence d’une civilisation mégalithique à Bouar dans l’ouest du pays. Les siècles qui suivirent demeurent obscurs et peut-être quelques travaux en linguistique comparative pourraient-ils contribuer à les éclaircir.
Pour nous renseigner sur une époque plus récente, nous avons quelques témoignages sur la traite esclavagiste. Selon P. Kalck (1974: 84) "Brazza et Monseigneur Augouard rencontreront encore à la fin du XIXe siècle de longs convois de pirogues chargés d’esclaves". Quelques lignes plus loin, l’historien fait remarquer: "Les linguistes notent l’apport de mots portugais que l’on retrouve dans les langues véhiculaires et notamment dans la langue d’eau devenue l’actuel sango."
Et il conclut ainsi (1974: 85) ce chapitre consacré à la période xvie-xviiie siècle: "En ce qui concerne l’histoire centrafricaine, il convient de retenir que le pays centrafricain était durement touché dès la fin du XVIIIe par les deux grandes traites orientale et occidentale."
L’histoire de l’esclavage à l’est semble la plus connue et les razzias de Sénoussi demeurent encore célèbres.
2. Le cadre historique de la colonisation
Situé au cœur du continent, le territoire qui est devenu la République Centrafricaine a été longtemps, pour reprendre l’expression de P. Kalck, "la dernière tache blanche qui subsistait sur les cartes de l’Afrique aux environs de 1885" (1976:127).
Devant ce vide, l’imagination occidentale a pu dériver de la manière la plus folle. À ce sujet, nous pouvons citer, non seulement la fiction présentée par J. Verne dans Cinq semaines en ballon mais aussi l’imposture scientifique des hommes à queue dont l’ouvrage de J.-D. Pénel, Homo caudatus , 1982, démonte les rouages.
L’histoire écrite commence avec l’arrivée des explorateurs européens: Schweinfurth, auteur de Im Herz von Afrika, voyagea aux confins du Soudan vers 1870; Junker, quelques années plus tard, pénétra en pays zandé mais l’insurrection mahdiste devait rendre difficile l’arrivée des explorateurs par l’est.
L’exploration et la conquête se firent par le sud, en remontant l’Oubangui et ses affluents. C’est pour des raisons géostratégiques que les Européens furent obligés de traverser ce vaste territoire. En effet, ils cherchaient à atteindre le Nil par la voie de l’Oubangui: Vangèle (1886-1890) pour le compte des Belges, Marchand (1897-98) pour celui des Français. Entre 1892 et 1900, quatre missions eurent pour but le lac Tchad (Brazza par la Sangha, Crampel, Maistre et Gentil à partir du coude de l’Oubangui). De ces tentatives de relier l’Oubangui au Chari, il nous reste quelques récits qui peuvent nous renseigner sur l’état du pays au moment de la conquête.
Parler de pays, au sens de nation, serait tout à fait inexact à cette époque. Comme le remarque C. Prioul (1982: 29): "Vers 1890, le seuil Oubangui-Chari est occupé par des ethnies riverainnes dont les domaines sont bien circonscrits dans l’espace et dont les us et coutumes diffèrent sensiblement."
Les contours actuels du territoire centrafricain ne furent fixés que progressivement en raison de l’âpre lutte que se livraient les puissances coloniales dans cette zone. On sait que le roi Léopold II de Belgique alla jusqu’à présenter de fausses cartes de la région! Cette situation est parfaitement résumée par Y. Boulvert (1986a: 91): "La frontière méridionale avec le Zaïre, sur le thalweg de l’Oubangui résulte de la rivalité avec les agents de l’État Indépendant du Congo" (1894). Celle, orientale, avec le Soudan est une conséquence de la crise de Fachoda a
Article publié le Friday, March 18, 2005