Frédéric Bintsamou alias Pasteur Ntoumi vit toujours dans le paysage politique congolais. Il s’exprime même. Ici au micro de François Bikindou. Interview exclusive.François Bikindou - Pasteur Ntoumi, le 28 Décembre 2009, vous preniez vos fonctions à Brazzaville comme délégué général auprès du Chef de l’Etat congolais, chargé de la promotion des valeurs de paix et de la réparation des séquelles de guerre. Cela fait pratiquement plus d’une année. Quel bilan pourriez-vous dresser de vos activités ?Pasteur Ntoumi - Nous voulons d’abord faire savoir que la délégation générale chargée de la promotion des valeurs de paix et de la réparation des séquelles de guerre est une institution que nous n’avons pas héritée. Ce n’est donc pas une institution qui a existé et à la tête de laquelle j’ai été nommé. Parce que justement c’est une nouvelle institution, il nous fallait asseoir une politique puis mettre en œuvre les activités. En 2010, nous avions connu quelques difficultés. Par exemple, nous n’avions pas eu de financements, juste une enveloppe de 100 millions de FCFA pour nous équiper. Par ailleurs, nous avons soumis beaucoup de projets au niveau de la tutelle, c’est-à-dire la Présidence, mais celle-ci ne nous a jamais répondu. C’est dire que, mises à part les rencontres que nous avions eues avec les institutions internationales et les activités initiées par celles-ci et auxquelles nous avions apporté notre appui (exemple l’Union Européenne avait organisé des activités dans le cadre du PCR, un programme consistant à réconcilier les communautés de base par la réparation des séquelles de guerre, réparation qui se traduisait en une aide dans l’agro-pastoral et l’habitat), nous n’avions pas eu d’activités en 2010. Y a-t-il eu une évolution en 2011 ?Les choses n’ont pas évolué. Vous savez, l’institution avait été négociée. Cela sous-entend qu’elle est politique. J’avais donc privilégié la rencontre avec le Chef de l’Etat. Or, cela fait presque deux ans, je n’ai aucune réponse à mes demandes d’audience : le Chef de l’Etat ne m’a toujours pas répondu. C’est vrai que je dois travailler, qu’il y a une feuille de route, mais dans sa mise en œuvre, j’ai aussi une vision en tant que partenaire de paix. Je ne suis pas un simple collaborateur. La paix, nous l’avons fait à deux. Pour cela, avant d’aller sur le terrain, j’avais pensé que le chef de l’Etat pouvait me recevoir pour que je lui confie ma vision sur la nation, la paix, la société.A partir du 3 Septembre 2011, nous organisons devant le stade Massamba Débat un salon de la culture de la paix. Ça sera une semaine culturelle au cours de laquelle nous expliquerons à l’opinion nos activités parce que notre institution n’est pas connue de tous les citoyens. C’est la première activité d’envergure que nous allons organiser cette année. Par la suite, nous aurons une autre activité, « journées portes ouvertes » à Pointe-Noire, à la fin du mois de septembre, pour expliquer aux sociétés basées dans cette ville qu’il faut que tout le monde s’implique pour pouvoir aider les ex-combattants et les personnes démunies. Nous avons également un autre projet : recenser tous ceux qui ont perdu biens, meubles et immeubles pendant les conflits armés. L’opération commencera début Octobre à Brazzaville. Les données ainsi collectées seront soumises au niveau de la tutelle, c’est-à-dire au niveau de la présidence avec des propositions de solution. Pasteur Ntoumi, on vous reproche aujourd’hui d’être plus dans le Pool qu’à Brazzaville...
Ntoumi et Patrick Eric Mampouya (La Voix du peuple @)
On ne peut pas me le reprocher, à moins de dire que je suis plus à l’étranger que dans le pays. Le Pool, c’est le Congo, comme la Bouenza par exemple. Vous savez que le Pool c’est le département qui a plus supporté le poids de la guerre. Aujourd’hui, après ma prise de fonctions, si je reste seulement à Brazzaville, certains vont récupérer la situation pour dire que : « lui, il est bien, il a été installé, il ne vous assiste plus ». Dans le Pool, j’ai lancé la campagne agricole depuis l’année passée. Nous avons réuni plusieurs associations que je suis en train d’appuyer en tant que leader politique. Ces associations ont créé une plateforme, un collectif qui œuvre dans plusieurs secteurs : agro-pastoral, éducatif, sanitaire, etc. Elles ont déjà un hôpital et quelques écoles. Puisque l’agriculture demande une grande énergie et une grande volonté, les gens ayant perdu cette culture-là de travailler, j’essaie en tant que leader politique de m’associer à eux, de travailler avec eux, de les encourager, de les motiver. C’est pourquoi, de temps en temps, je suis à cheval entre Brazzaville et le Pool. Le conseil national des républicains, votre parti, est donc présent dans le Pool ?Dans le Pool, nous avons 9 conseillers. Pour un jeune parti, cela veut dire que nous avons une grande base. A Brazzaville, nous sommes en train de regarder les enjeux de 2012, malgré certaines irrégularités constatées lors de l’élection législative partielle de Mindouli. C’est pourquoi nous insistons pour que les structures d’organisation des élections soient revues. Nous ne voulons plus de cette Conel-là qui triche et qui fait de la mascarade. Mais on se prépare pour 2012. Pasteur Ntoumi, où se situe votre parti ? A l’opposition, à la mouvance présidentielle ou au centre ?En démocratie, il n’y a pas de centre. Ou vous êtes au pouvoir ou vous êtes à l’opposition. Moi, je ne suis pas au RMP, c’est-à-dire je ne suis pas à la majorité présidentielle. Je n’ai pas un accord avec le RMP. Le seul accord que j’ai c’est un accord de paix que j’ai signé. Nous sommes du côté de l’opposition.Mais cette opposition manque de cohésion, de discours mobilisateur et de stratégie appropriée... Quand les choses ne seront pas faites comme il se doit, l’opposition ne pourra pas être efficace. Un pouvoir qui craint son opposition n’est pas un bon pouvoir. Il faut quand même une forte opposition pour que les choses marchent. La constitution énonce des droits concernant les institutions. Et l’opposition peut être considérée comme une institution. Mais, aujourd’hui, l’opposition est marginalisée. Ce qui lui revient ne lui est pas donné. Au Congo, il n’y a pas de chef de l’opposition, alors que ce dernier devrait aussi avoir un traitement. Quand nous lisons la constitution, on parle de financement des partis politiques. Ici, au Congo, ça n’existe pas. Si vous n’êtes pas un parti de la mouvance présidentielle, vous n’avez pas de financement. Or, en politique, il faut aussi impressionner. Quand vous allez à une réunion politique, ceux qui sont au pouvoir viennent dans des VX, des 4x4…, et vous, vous arrivez en taxi ou à pied. L’opinion dit que vous n’avez rien, alors qu’eux ont de l’argent. Mais les gens ignorent que cet argent appartient à l’Etat congolais et qu’ils n'en sont que des gérants. Il ne peut y avoir une bonne démocratie tant que la majorité ne respectera pas la minorité. Quel sentiment avez-vous de travailler avec celui qui a été hier votre ennemi ? Le sentiment que j’ai est un sentiment de paix. A ma connaissance, celui qui était un ennemi est devenu un partenaire. La paix est primordiale. La paix, c’est moi qui l’ai signée et je dois la faire aboutir par tous les moyens. Je voudrais aller de l’avant. Même s’il y a des divergences, il faut privilégier la paix, la réconciliation, le dialogue.Propos recueillis par François Bikindou
************
Divers
Une Congolaise à l'honneur
Dominique Tchimbakala, Française d’origine congolaise est présente à l’antenne de BFM TV (première chaîne d'information en France), comme présentatrice du journal d'information jusqu’à la mi-août dans la tranche horaire 14-18 H.
Dominique a passé son bac au Congo en 1994 (Lycée St Exupéry). Elle a continué ses études en hypokhâgne à Paris, avant de passer une licence d’histoire, une maîtrise de sciences politiques à Nanterre, un troisième cycle en management des médias et une formation au centre de perfectionnement des journalistes à Paris.Elle a longtemps travaillé comme reporter à France 2 et intervient toujours à ce titre pour le magazine de santé de France 5.
Le métier dont fait preuve Dominique à l'antenne de BFM TV laisse-t-il présager une grande carrière comme présentatrice de journal ? En tout cas nous le lui souhaitons.
Article publié le dimanche 21 août 2011
1739 lectures